Marketing sociétal: S’impliquer, donner, même en période de démarrage de son entreprise?

On a parfois l’impression que l’implication sociale ne fait pas partie des priorités d’affaires, particulièrement en période de démarrage d’entreprise. J’aborderai, tout au long du mois d’août, la thématique du marketing sociétal et de l’implication sociale avec 3 jeunes entrepreneurs sur le blogue Le feu sacré.

Cette semaine, je m’entretiens avec Andry Lant Rakoto, fondatrice de Marclan, une entreprise distributrice de produits fins de Madagascar. Pour elle, le manque de temps, les liquidités limitées et les impératifs impondérables d’une entreprise naissante limitent, effectivement, souvent l’implication des jeunes entrepreneurs. Mais il est cependant toujours possible de faire sa part en tant que citoyen corporatif, peu importe la taille de son entreprise. 


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Aider à la hauteur de nos moyens

Participer au développement d’une économie durable, sensibiliser ses clients, modifier les habitudes de consommation pour le bénéfice collectif, faire des dons corporatifs, est-ce l’apanage des grandes sociétés établies?

Pour Andry Lant Rakoto, fondatrice de Marclan, une jeune entreprise distributrice de produits fins de Madagascar établie au Québec depuis à peine plus d’un an, le stade de développement de son entreprise importe peu. Quand on veut s’impliquer, on le fait!

L’implication peut prendre différentes formes, mais quoi qu’il en soit, tous les gestes, petits et grands, comptent!

Au niveau des tactiques promotionnelles, des actions peuvent être posées pour aider, malgré des moyens financiers limités.

« À plus petite échelle, il est toujours possible de participer à des levées de fonds en achetant des billets de tirage ou autres, de réserver des petits encarts publicitaires dans des publications de causes caritatives comme des calendriers, de donner des paniers de produits destinés à des événements spéciaux. On a rarement les mains réellement vides! » mentionne Andry.

S’il n’est pas encore possible pour Marclan de commanditer de façon importante des événements ou causes caritatives, c’est au niveau de la chaîne de distribution que les efforts sont concentrés. Le choix des fournisseurs est, pour la fondatrice, tout aussi crucial dans l’établissement d’une stratégie marketing et contribue à faire une différence marquée.

« Chez Marclan, je me fais un devoir de collaborer avec des fournisseurs malgaches qui pratiquent le commerce équitable, assurent la traçabilité des produits que j’importe, et valorisent la protection de l’environnement et le développement durable. Je fais affaires avec des producteurs certifiés bio, qui n’utilisent jamais de produits chimiques. C’est important pour moi de partager ces valeurs cruciales avec mes partenaires. Aussi, mes fournisseurs sont pratiquement tous issus d’ONG et participent eux-aussi à des causes, particulièrement celles visant l’amélioration du niveau de vie de leur communauté. En bout de ligne, les efforts de tous et chacun sont donc soutenus», ajoute Andry.

Un marketing opportuniste?

« Tout est une question d’intention. Je n’ai jamais perçu de réel opportunisme dans l’adoption de pratiques marketing sociétales. Comme dans toute chose, il y a parfois des abus, des incongruences, mais même quand les entreprises impliquées apparaissent « intéressées » à nourrir une image positive, ou semblent avoir des visées plus « communicationnelles», force est d’admettre que leur implication est tout de même aidante et souvent essentielle pour les organismes bénéficiant de leur appui. C’est important aussi d’encourager une culture de dons et de mécénat dans les milieux d’affaires», renchérit-elle.

Le leg de nos valeurs

Est-ce que le background des entrepreneurs influe beaucoup dans leur propension à s’impliquer via les activités de leur entreprise?

Assurément!

Le fait d’avoir baigné dans un contexte de bénévolat, et-ou à l’inverse, d’avoir pu profiter soi-même de support de la part d’un organisme bienfaiteur au cours de sa vie, révèlent souvent la fibre caritative chez les entrepreneurs. Le cas d’Andry n’y fait pas exception.

L’entraide est une valeur familiale profondément ancrée chez elle. Son don de soi est hérité entre autres de son grand-père, engagé depuis plus de 50 ans dans sa communauté. Ce dernier a même mis sur pied, à Madagascar, la Fondation Ana. Cette fondation construit des écoles, nourrit les élèves du village natal de son père et veille au partage équitable des ressources. C’est sans surprise qu’elle compte donc, à son tour, s’adonner à la philanthropie, dès qu’elle le pourra.

« À défaut de donner de l’argent, il est toujours possible de donner du temps aussi! Ici au Québec, plusieurs causes nobles m’interpellent, mais plus particulièrement celle du Club des petits déjeuners, qui poursuit des objectifs similaires à ceux de Grand-Papa. Puis, il y a aussi l’option de faire du coaching d’affaires auprès des organismes », mentionne-t-elle.


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Le prix des vacances: Isabelle Moïse, travailleuse autonome depuis à peine un an, se confie sur l’art de conjuguer périodes de repos et business. Cette entrevue est publiée dans le cadre du dossier spécial Finances sur le blogue Le feu sacré.

À ne pas manquer mardi prochain:

Mon entrevue avec Frédéric René, co-fondateur de Liki, une startup de Montréal en commerce électronique. L’implication sociale de l’entreprise est l’occasion d’encourager les causes les plus chères à ses employés.

Donc, c’est un rendez-vous!

Karina Brousseau, éditrice

Finances et travail autonome: le prix des vacances!

La question du financement est abordée tout au long du mois de juillet sur le blogue Le feu sacré. Cette semaine, je discute avec Isabelle Moïse, à son compte depuis à peine un an comme consultante en événementiel, marketing et communications. Elle nous parle de son premier exercice de rapport d’impôts 2014 pour le compte de son entreprise iMoïse Conseil et de sa difficulté à prendre des vacances sachant le suivi administratif et financier toujours en suspend.


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Assurer son filet de sécurité

À son compte depuis à peine plus d’un an, la question du financement au démarrage, revêt, pour Isabelle Moïse, des allures de bootstrapping, principalement. Depuis qu’elle est en affaires, elle est beaucoup plus consciente et avisée de son budget personnel qu’avant. 

« Avant, comme salariée en couple avec un autre salarié, j’avais moins à me préoccuper des dépenses au quotidien. On pigeait dans notre « poche » commune, on était à l’aise, on ne faisait pas beaucoup de suivis par « catégorie de dépenses », comme je le fais maintenant que je suis seule à la barre. Je réalise que toute ma façon de dépenser a changé depuis l’aventure iMoïse Conseil. Je suis d’autant plus alerte au gaspillage, ce qui n’est pas une mauvaise chose. Cela dit, je ne me prive pas pour autant et je me paye du luxe de temps en temps, mais je suis plus consciente de la dépense. J’apprécie d’autant plus les petits plaisirs que je me paye. J’ai toujours vécu à la hauteur de mes moyens, j’ai toujours eu conscience de l’argent et j’ai toujours valorisé le paiement de tous mes comptes.  Par contre, je ne suis pas toujours en train d’économiser pour « ma retraite » non plus. Si j’étais toujours en couple, je serais probablement moins en mode « boostrapping » parce que je serais moins angoissée pour la préserve de mon confort et mon indépendance financière. L’appui de l’autre permet définitivement un certain filet de sécurité financière», confie-t-elle.

Retirer un maximum de l’Impôt

Suite à sa première année complète à titre de travailleuse autonome, Isabelle s’en est finalement bien sortie avec l’impôt.

«  J’anticipais un peu les résultats finaux, puisque j’en étais à ma première année complète comme travailleuse autonome et que je n’étais pas certaine d’avoir conservé suffisamment de ressources pour le paiement de l’Impôt. De plus, je n’étais pas certaine du calcul des taxes. En définitive, j’ai réalisé avoir droit à plus de déductions que ce que je ne le croyais. Les lois fiscales varient beaucoup et je ne savais pas encore trop sur quel pied danser en termes de déductions possibles. Heureusement que j’ai une bonne comptable! Son apport a été crucial pour moi. Je recommande à tous, au moins pour la première année en affaires, de faire appel à un pro pour déposer des rapports fiscaux optimaux. Ne serait-ce que pour apprendre en accéléré sur les impératifs qui collent directement à notre situation», avise Isabelle.

Des affaires qui ne prennent pas de vacances!

Difficile de planifier des vacances quand on n’a personne à qui déléguer ses dossiers durant les temps d’arrêt, que les journées sont occupées 15 heures sur 24 et qu’on est plus concerné financièrement parlant.

Isabelle Moïse aligne cet été des escapades dans notre belle province et peut-être un petit tour sur le bord de la mer pour se ressourcer. Pour décrocher, Isabelle doit s’éloigner de la ville, elle doit impérativement partir de chez elle, sinon, elle reste toujours en mode ‘’travail’’, toujours prête à faire avancer certains dossiers ou à travailler sur de nouveaux projets. 

« L’inconvénient, en restant dans le coin, est que j’ai tendance à vouloir prendre de l’avance sur les aspects administratifs que j’aurais peut-être un peu négligés durant le reste de l’année. Dur, dur, d’éteindre son cellulaire! Le développement des affaires, entre autres, peut ralentir en période de production. Les périodes plus tranquilles seraient le moment de m’y attarder. En plus, comme mon bureau est à la maison, je suis confrontée visuellement à ma « petite pile » de choses en suspend dès que je prends une pause. Par contre, quand je quitte pour les vacances, je décroche instantanément. Même de simples sorties à la campagne me permettent de me ressourcer. Montréal a certainement beaucoup à offrir en terme de divertissement durant la belle saison, mais comme j’y habite et que j’en profite déjà tout au long de l’année, ce n’est pas en restant à Montréal que je peux faire la coupure», dit-elle.

Le temps de planification des vacances est également à prévoir à l’agenda, tout comme l’ajout de la catégorie « fun dollars » à notre budget, si on veut être capable de mettre de l’argent de côté pour les périodes plus creuses.

« En ce qui me concerne, je m’arrange pour arrêter dès que les clients partent en vacances. Je me calque un peu sur leur agenda! Aussi, j’en profite pour étirer certains déplacements à l’étranger quand c’est possible. Cet automne, ce sera le cas, puisque je serai en mission à Bordeaux pour le SIDIIEF. Des avantages agréables dont je compte bien profiter!» conclue-t-elle.


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Puisqu’on parle de vacances et des temps de pause pour les entrepreneurs, je vous suggère de lire Le corps, ce partenaire d’affaires capricieux, mon entrevue avec Frédéric René, co-fondateur de Liki, une startup de Montréal spécialisée en commerce électronique

Bonne lecture!

Karina Brousseau, éditrice

 

 

Startup et financement: l’encaisse comme arme ultime

Comme une épée de Damoclès, l’argent est la question planante dans l’esprit de tous les entrepreneurs. À chaque virage, chaque embranchement de la trajectoire de développement d’une entreprise, le financement peut représenter une menace à la survie des projets, l’étendue maximale des tactiques promotionnelles, la formation des employés, etc. Je discute de la question avec Frédéric René, un entrepreneur en commerce électronique qui ne baisse jamais la garde concernant les risques, malgré les conditions favorables dans lesquelles son travail s’effectue a priori.


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Inévitable « bootstrapping »

Liki, une jeune startup offrant des solutions technologiques aux marchands et aux ambassadeurs d’industries, connaît depuis près de 3 ans déjà, un succès enviable. Récemment offerte en marque blanche à des revendeurs, la solution de commerce en ligne fait beaucoup parler dans le marché. Les ventes de la solution vont bon train, le nombre d’employés a triplé depuis un an et la boîte s’apprête à ouvrir les valves sur de nouveaux marchés étrangers.

En cette période charnière de croissance où tout à l’interne demande d’être normalisé, les processus de vente resserrés et structurés, l’embauche et la promotion des services de l’entreprise grugent des budgets accrus.

Malgré le succès rapide de leur précédente entreprise, Les enchères Bidou, et le fonds de roulement intéressant qui fut réinjecté dans Liki à ses débuts suite à la vente de Bidou, l’encaisse (le cashflow) est constamment surveillée.

« Au démarrage, Liki est allé chercher des argents de différents programmes de prêts et de subventions. La Société économique de développement Ville-Marie,  la Fondation Montréal Inc., Futurpreneur (anciennement la Fondation canadienne des jeunes entrepreneurs) et la BDC ont cru en nous dès le départ. Des investisseurs privés ont également pris part à notre aventure. Cependant, de mois en mois, les revenus rattachés aux ventes ont été en deçà des prévisions. Il nous est arrivé à deux reprises de pratiquer le bon vieux « bootstrapping » et de se serrer la ceinture, mon frère co-fondateur et moi, pour être certains de pouvoir payer les employés. C’était limite, comme on dit! On y est arrivé, mais on est encore sensible financièrement. Chaque sous est compté et chaque action est méticuleusement sous-pesée pour assurer ses retombées», confie Frédéric.

Une course contre la montre

Les investisseurs privés recherchent typiquement à investir dans des entreprises où les revenus sont récurrents et éventuellement, exponentiels. Chez Liki, les derniers mois ont été concentrés à s’associer à des revendeurs en marque blanche, donc les cycles de ventes ont été plus longs qu’à l’habitude. Aussi, certains partenaires n’ont pas pu respecter leurs engagements initiaux. En conséquence, les frères René ont été contraints de cautionner personnellement des prêts proposés par les grandes banques et ils ont dû devancer certaines recherches de financement. L’encaisse est devenue comme une épée de Damoclès.

« Je suis d’accord avec Andry Lant Rakoto (qui le mentionnait dans sa dernière entrevue); les banques sont frileuses aux risques et elles ont besoin de preuves de concept avant de prêter de façon plus imposante. On avait initialement prévu notre prochaine ronde de financement au printemps 2016, mais nous devrons la devancer à cet automne. On doit donc, par ricochet, devancer l’exécution de certains plans de mise en oeuvre pour avoir le plus de cartes en main et convaincre les différents bailleurs de fonds. Cela sous-entend le chamboulement des besoins en termes de types de ressources. La question des liquidités refait inévitablement surface, à chaque fois! » explique-t-il.

Les défis de la dotation et de la rétention des employés

Bâtir une équipe chevronnée à petit prix, maximiser l’implication des employés, favoriser la rétention de ces derniers, les défis rattachés à l’agrandissement de la « famille » sont également très importants.

« Les salaires offerts dans les entreprises en démarrage sont nécessairement plus bas que dans les grandes entreprises. Ça prend donc des gens motivés, qui s’impliquent avec leur coeur autant que leur tête. Souvent les jeunes diplômés viennent faire leurs classes dans les startups, parce que c’est l’endroit idéal pour toucher à plein de choses, étendre ses perspectives et ajouter de nouvelles cordes à son arc. On leur laisse souvent plus d’autonomie et de flexibilité, ils ont le sentiment de faire partie d’une famille, et plus que tout, de participer concrètement à l’aventure entrepreneuriale. Leurs réalisations sont toujours tangibles et les nouveaux défis sont quotidiens. Il y a aussi souvent des avantages en termes de possibilités d’achat d’actions à un tarif privilégié.
Pour l’employeur, il y a différents crédits d’impôt et des bons d’emplois du gouvernement (comme dans le Programme Emploi Jeunesse) qui peuvent être utilisés pour réduire le fardeau de la dotation. Certains entrepreneurs peuvent même profiter des crédits CDAE (développement des affaires électroniques) qui représentent un crédit d’impôt équivalant à 30 % du salaire admissible, jusqu’à concurrence d’un salaire annuel de 83 333 $ par employé admissible. », mentionne Frédéric.

Présentation « béton » pour bailleurs de fonds tatillons

À quelques semaines de leur prochaine ronde de financement, l’équipe est en feu et met les bouchées doubles pour accélérer la récolte du fruit de leur travail acharné des derniers mois. Frédéric et ses partenaires se préparent à faire une présentation du tonnerre aux investisseurs potentiels et grandes institutions bancaires. C’est la croisée des grands chemins.

« On vise à atteindre notre seuil de rentabilité. On visera dans les six zéros. Inévitablement, notre plan de développement doit être « béton » et l’évaluation de notre marge de manoeuvre également. Avec l’expérience, je me suis rendu compte que ce n’est pas tant le montant demandé qui compte, pour les bailleurs de fonds, autant que la justification du montant demandé et la solidité de l’argumentaire. Croyez-moi, on sera prêt! » ajoute-t-il, déterminé.


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Financement: des prêts sans risque! Les banques sont-elles réellement partenaires de la réussite des jeunes entrepreneurs? Mon entrevue avec Andry Lant Rakoto, qui élabore sur le modèle de prêts des grandes institutions financières.

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Karina Brousseau, éditrice

Financement : des prêts sans risque!

La détermination dont les entrepreneurs en démarrage font preuve m’inspire énormément de respect. Une des questions récurrentes, qui les hante au quotidien et qui mérite certainement l’objet d’une thématique sur le blogue Le feu sacré est sans contredit celle du financement. J’ai voulu mettre en lumières, tout au long du mois de juillet, les efforts des 3 entrepreneurs en démarrage d’entreprise que je suis depuis octobre dernier et leurs démarches dans les dédales de l’échiquier du financement.

Andry Lant Rakoto, fondatrice des produits fins Marclan, nous parle aujourd’hui de ses débuts facilités par certains organismes de subventions, mais également des défis engendrés par les impératifs de financement des grandes institutions bancaires.


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Les banques, partenaires de notre réussite?

Comme plusieurs entrepreneurs, Andry n’a pas hésité à investir ses sous comme mise de fonds au début de son aventure entrepreneuriale. Elle a, de plus, profité de l’aide de Futurpreneur (anciennement connu sous le nom de la Fondation canadienne des jeunes entrepreneurs). En tant que jeune immigrante, elle a aussi bénéficié du support du Fonds Mosaïque favorisant les femmes en affaires.

Cependant, malgré le fait qu’Andry ait un plan d’affaires solide, un mentor chevronné à ses côtés et un carnet de commandes bien rempli, elle n’a pas encore profité de prêts bancaires.

Andry vise le marché de l’alimentation et elle a récemment modifié son plan de commercialisation pour offrir désormais ses produits aux distributeurs.

Pour elle, la question demeure: le financement des activités de démarrage est-il plus facile à trouver que le financement des phases de développement et de croissance de notre entreprise?

Andry en a souvent été témoin, pour elle-même ou pour des homologues. Elle avance:

« Malgré l’impression que peuvent donner les multiples campagnes publicitaires des grandes institutions bancaires vantant leur enthousiasme face à l’entrepreneuriat et promouvant la générosité de leurs programmes de financement des nouveaux projets d’affaires, la réalité en est toute autre!  Au démarrage, les entrepreneurs se butent plus souvent qu’autrement à des refus de financement par ces dernières.
À mon avis, le financement du démarrage devrait être mené par étape du cycle d’avancement de l’entreprise. La preuve de concept n’est que la première étape et dans la plupart des cas, réservée à notre mise de fonds, les subventions et les concours.
Les étapes suivantes seraient la preuve de marché, la croissance et ainsi de suite. Le montage financier devrait ainsi considérer les différentes étapes et cibler les sources de financement adaptées à celles-ci. La vérité, c’est que les banques et les autres bailleurs de fonds classiques prêtent quand la preuve de concept est faite. Jusqu’à temps que les revenus soient suffisamment élevés à « leur goût », les excuses de refus parfois systématiques abondent et sont justifiées suite aux résultats de leurs « modèles d’analyse de risques et probabilités ». On n’y échappe pas ! »

Pas juste une question d’argent

Par ailleurs, il ne s’agit pas seulement de faire arrimer les budgets et les aspirations de rendement des bailleurs de fonds avec la réalité financière de notre entreprise pour qu’un financement soit porteur de succès. Au-delà de l’argent, il faut aussi que les visions sur les prochaines étapes soient assumées par toutes les parties concernées.

« Le côté relationnel, les rapports de force et le principe des visions communes s’appliquent aux organismes de prêts comme aux anges financiers ou aux banques. Un entrepreneur doit être attentif aux types de projets soutenus par les sources visées. Il faut reconnaître que tous les bailleurs de fonds ont leur zone de confort. S’associer à un organisme et travailler conjointement avec un directeur de compte ou un financier qui ne comprend pas bien les enjeux réels auxquels on fait face nous fait perdre plus de temps et d’énergie qu’autre chose. Il y a souvent une question cruciale de momentum en affaires. La recherche de financement est généralement planifiée à l’agenda de l’entrepreneur, autant que faire se peut, à l’aide d’indicateurs-clés. Mais parfois, les rondes de financement doivent être devancée, pour différentes raisons. Par exemple, une demande accrue du marché nécessitant une augmentation de la production, donc des investissements au niveau des infrastructures, pourrait entraîner un déplacement des efforts de financement à l’agenda. Si les investisseurs prennent ensuite trop de temps pour se décider, ou même se désister, l’entrepreneur peut rater le bateau comme on dit! Rien ne sert de s’acharner dans ces cas-là. Le temps aussi, c’est de l’argent, et il vaut parfois mieux faire cavalier seul que d’être mal accompagné! » avise Andry.

Prévisions pessimistes, réalistes, optimistes: permettent-elles vraiment de se faire une tête?

L’erreur est classique et les entrepreneurs en démarrage eux-mêmes vous le diront: ils sont souvent trop optimistes en ce qui a trait à leurs ventes et leurs prévisions budgétaires ne tiennent pas assez compte des erreurs potentielles, des retards de paiements des clients, des imprévus du marché, etc.

Andry en rajoute: « Les prévisions financières, c’est bien! Mais ces prévisions révèlent davantage sur le chiffre d’affaires alors que le nerf de la guerre pour durer en affaires, c’est le budget de caisse, autrement dit, le cashflow au fil des mois. Avec mon expérience jusqu’à présent, je dirais que c’est davantage là-dessus qu’il faut analyser les risques pour s’assurer de la pérennité de l’entreprise. »

Un petit monde que celui des bailleurs de fonds!

Les sources d’aide sont nombreuses et les formes de financement se diversifient. Depuis quelques années, la popularité du « financement participatif » ou crowdfunding connaît un essor incontestable. Cependant, ce type de financement n’est certes pas adapté pour toutes les industries. L’image de la marque, son offre aux consommateurs, la présentation du dossier sur les sites destinés à cet effet (les Kickstarter, et tutti quanti), et l’aspect viral de la proposition de l’entrepreneur influencent grandement le succès de ces levées de fonds grand public. Pour Andry, le financement participatif ne s’est pas avéré de grand secours. Elle se concentre maintenant sur les sources plus conventionnelles.

De façon générale, les rondes de financement se chevauchent et les états financiers doivent refléter ces dernières. L’importance du montage financier est parfois cruciale pour convaincre les différents investisseurs. Si les lettres d’appui « inter-financement » sont rares, il peut y avoir des financements conditionnels à l’obtention de d’autres.

« C’est un bien petit monde! C’est donc d’autant plus important de tabler sur notre notoriété, les relations publiques, notre image dans les réseaux sociaux, la mise de l’avant de notre projet dans notre communauté. C’est certain que cela influence positivement les éventuels bailleurs de fonds. En ce qui concerne Marclan, j’ai vu une différence depuis que j’y consacre davantage d’énergies en ce sens», confie Andry.


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Karina Brousseau, éditrice

Le love money : mariage de l’amour et de l’argent ?

L’argent. Voici sans doute la substance la plus perfide, la plus complexe à laquelle nous ayons affaire au cours de notre vie.

Douglas Kennedy auteur de Combien?

Solange Côté

Solange Côté, ASC

Les proverbes et adages sur l’argent sont aussi nombreux que ceux sur l’amour. L’association de ces deux mots réunis dans l’expression love money a quelque chose d’anachronique. Il est à noter, qu’au sud de la frontière, on parle de seed money.

Il est notoire que l’amour et l’argent font rarement bon ménage et pis encore, en cas de divorce en amour ou en affaires, l’argent est l’objet de négociations tout aussi féroces que déstabilisantes.

La notion du love money fait-elle exception à la règle?

Bien que le love money soit tout à fait indiqué pour le démarrage d’une entreprise en raison du fait que le financement institutionnel est quasiment impossible à ce stade, force est de constater qu’il n’est pas toujours requis. Notons que les trois entrepreneurs suivis par l’éditrice de ce blogue n’ont pas eu recours au love money. Question de culture d’une part (Andry) et question d’autosuffisance pour les deux autres entrepreneurs (lire les témoignages d’Isabelle et de Frédéric). Cette situation est enviable du point de vue d’un coach d’affaires.

La relation entretenue avec l’argent puise ses origines à différentes sources : culture, éducation, formation et autres. À l’instar de l’ADN, cet héritage façonne le degré de facilité d’une personne à traiter d’argent. C’est donc dire que pour se lancer en affaires, il est indispensable d’acquérir cette liberté à parler d’argent. Ceci donne entre autres du pouvoir pour évaluer ses besoins en financement, ses capacités de remboursement, ses possibilités d’expansion et son indice de rentabilité. Au royaume des affaires, l’argent est une réalité.

Définissons ce qui peut faire consensus : Le love money c’est du financement – un emprunt obtenu de proches (famille et amis) pour la phase de démarrage d’une entreprise. Qui dit emprunt, dit remboursement assorti de conditions. Combien d’argent? Difficile de mettre un montant plafond. Toutefois il est important de préciser ici que plus le montant sera substantiel plus l’entente conclue devra être formalisée. Le simple billet de reconnaissance de dette ne saurait répondre à cette exigence.

Pour ne pas connaître l’enfer, il faut éviter de danser avec le diable!

Comment faire avec le love money? Vous avez besoin de combien? Honnêteté et authenticité sont des valeurs à cultiver. Inutile de se raconter des histoires sur les perspectives de succès du projet, il faut en tout temps être objectif. Les proches qui seront sollicités doivent croire en vous et en votre projet pour « allonger les billets ».

Surprise! Ils doivent également être prêts à perdre cet argent si l’aventure tourne mal. Ce n’est guère vendeur comme argument mais c’est d’un réalisme cruel. Il faut savoir que sur l’échelle des risques, le love money se situe quelque part entre la loterie et le capital de risques, à une nuance près que les montants diffèrent. Les dons ou cadeaux en argent, même s’ils sont donnés avec amour, ne se qualifient pas comme love money.

Revenons à la notion d’emprunt ou de prêt. Les sommes du love money doivent être traitées avec toute la rigueur de ce type de transaction financière. Elles doivent faire l’objet d’une entente entre les parties, entente qui devra spécifier le montant concerné, le taux d’intérêt (fortement recommandé) correspondant à celui du marché et l’échéance en fonction de la capacité de remboursement déjà sagement planifié. Réjouissez-vous, cette discipline pave la voie à du financement institutionnel d’importance lorsque le temps sera venu, tout en faisant la démonstration d’une saine gestion. Une sorte de couronnement…

Et si?… Dans le meilleur des mondes, l’entreprise aurait dû connaître le succès, le projet était porteur et les études le démontraient. Il y avait une demande et plus encore. La réalité est que moins de 50 % des entreprises survivent aux 3 premières années et moins de 20 % réussissent à monter sur le podium. Dans cette vision dantesque, voir ses rêves réduits à néant en plus d’entrainer ses proches à des pertes financières possiblement importantes exige une force de caractère peu commune et de la résilience. Avec l’argent peuvent s’envoler également les relations!

Quelle est la valeur d’une relation dans l’univers du love money?

Il y a toujours deux côtés à une médaille et le love money répond à cette règle: il comporte autant de risques que d’avantages. Voilà pourquoi, un choix éclairé s’impose.

Être entrepreneur c’est oser, c’est être visionnaire et c’est voir plus grand que soi…

Love money: ça dépend d’où et quand!

Le love money peut faire toute la différence en période de démarrage pour les entrepreneurs qui en profitent… ou non. Le rapport à l’argent qu’entretiennent les entrepreneurs, leur culture et leurs valeurs, le montant d’argent en jeu et la « souplesse financière des prêteurs » sont autant d’éléments qui influent sur la considération du love money comme source de financement pour une jeune pme. Les articles des deux dernières semaines allaient d’ailleurs en ce sens (voir Love money: non merci? et Love money: question de moyens et d’attentes!)

Question d’entourage et de valeurs familiales

Isabelle Moïse vient d’une famille où la culture entrepreneuriale est bien implantée. En commençant par son grand-père maternel qui a fondé une pme de services d’électriciens dès sa jeune vingtaine. Cette entreprise, qui a embauché, au plus fort des activités d’affaires, près de 75 employés, fut en activité durant près 40 ans. Oncles, tantes, père, mère ont tantôt soit repris la business du grand-père maternel, ou bien ont été consultants à leur compte, ou encore leaders d’opinion publique. Autant de modèles inspirants et toujours bien présents dans sa vie.

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Lorsqu’elle est partie à son compte il y a un an, Isabelle n’a pas eu besoin d’aide financière d’aucune façon. Les contrats ont rapidement été au rendez-vous, nombreux, grâce à son background et son réseau. Elle n’a pas eu besoin de se doter d’équipement particulier puisqu’elle détenait déjà ses outils de travail. Finalement, elle pouvait compter sur ses économies, si besoin était, comme coussin de sécurité.

Il faut dire aussi qu’en comparaison aux deux autres entrepreneurs suivis dans ce blogue (voir Andry Lant Rakoto (commerce au détail de produits fins d’origine malgache)), et Frédéric René (solution de commerce électronique)), ses frais fixes inhérents à ses activités professionnelles comme consultante en communications, marketing et événementiel sont extrêmement bas. Elle n’a pas d’inventaire à gérer, n’a pas eu à débourser des sommes faramineuses en recherche et développement de produits et n’a pas d’employés pour l’instant.

Cela dit, si, dans le cadre du financement d’un projet particulier ou pour l’expansion de son entreprise, elle avait besoin d’y avoir recours, elle n’hésiterait pas, en théorie, à envisager l’option du love money. Elle sait que cette démarche ne serait pas mal vue dans la famille et qu’elle trouverait fort possiblement des prêteurs, dans la mesure des moyens respectifs de ses proches.

Elle nuance illico: «Le love money comme prêt, par contre! Pas comme don. » Ainsi, elle signerait une reconnaissance de dette et se ferait un devoir d’honorer les délais de remboursement prévus.

Ça dépend quand!

Si l’idée d’emprunter du love money était pour elle tout à fait acceptable au démarrage ou dans la mise sur pied d’un nouveau projet, elle n’envisagerait absolument pas cette dernière tactique comme bouée de secours, en période de difficultés financières dans son entreprise.

« Je me sentirais mal d’exposer d’entrée de jeu mes proches à de gros risques (si mes difficultés étaient dues à l’économie ou aux aléas du marché, à titre d’exemple). Pire encore, de solliciter des sommes suite à des erreurs de gestion, de planification de ma part. » confie-t-elle.

Pour envisager le love money, il faudrait que le cadre d’investissement soit positif au départ, que le montant prêté par ce proche soit appelé à fructifier et que ce soit un contexte porteur d’avenir pour les deux parties. » précise-t-elle.

« Time money »

Au delà de l’argent sonnant par ailleurs, Isabelle reconnaît la quantité d’innombrables conseils d’affaires dont elle jouit de la part de ses proches, et qui ont une valeur inestimable pour elle. Plusieurs des membres de sa famille oeuvrent dans des secteurs connexes au sien. Comptables, experts en relations publiques, spécialistes marketing et tutti quanti sont autant d’expertises directement à la portée d’Isabelle grâce à la grande générosité en temps de ces derniers. Pratique, c’est le moins qu’on puisse dire. Et tout aussi valable qu’un chèque, sinon plus, à ses yeux!

Sondage-éclair: Votez vous aussi, si ce n’est déjà fait! C’est fascinant de voir comment l’opinion générale varie au gré des articles publiés dans notre dossier spécial de décembre sur le love moneyLes résultats seront dévoilés dans les prochains jours.

Quoi de neuf?

Tel qu’annoncé le mois dernier, Isabelle achève présentement la mise en place son site web et l’alignement de la promotion de ce dernier.

La période des Fêtes représente aussi une période intense de réseautage, où les activités corporatives et les partys de Noël se multiplient. Elle est donc très sollicitée, mais elle y prend toujours beaucoup de plaisir et apprécie renouer le contact avec tous et chacun.

L’heure en est également au bilan de la dernière année. La question des impôts est une préoccupation. Aura-t-elle droit aux déductions fiscales prévues, aura-t-elle tout bien calculé ou envisagé?

Nous reviendrons d’ailleurs dans ce blogue sur cette question budgétaire préoccupante pour tous les entrepreneurs.

À ne pas manquer la semaine prochaine:

Une mentor et passionnée d’entrepreneuriat, Mme Solange Côté, se joint à l’équipe de commentateurs du blogue Le feu sacré.

Elle nous partagera son expérience en matière de love money et commentera les propos des dernières semaines.

Donc, à la semaine prochaine!

Karina Brousseau, éditrice du blogue